Le château d’eau de l’Europe s’épuise

Le changement climatique perturbe l’équilibre de la région alpine, habituellement riche en eau. Les épisodes de sécheresse tels que ceux de l’hiver dernier et de ce printemps sont de plus en plus fréquents – avec des conséquences majeures pour la nature et la société.

En ce début d’été, les montagnes ont déjà très soif : le niveau de nombreux lacs et le débit de nombreuses rivières sont à un niveau historiquement bas, en particulier dans les Alpes occidentales. Certaines centrales hydroélectriques sont déjà à l’arrêt, ou ont dû réduire massivement leur production. La neige de l’hiver dernier n’est pas là pour reconstituer les réserves d’eau pour l’été. Dans certains refuges alpins, l’eau nécessaire à la restauration et à la production d’énergie pourrait manquer très tôt dans la saison. En Suisse, un refuge sur cinq est confronté à des problèmes d’approvisionnement en eau, et le Rifugio Jervis dans le Haut Val Pellice (Italie) a eu du mal cette année à maintenir ses activités au printemps. Dans le pire des cas, les refuges doivent fermer pour cause de pénurie d’eau, comme a dû s’y résoudre en 2021 le Rifugio Quintino Sella au pied du mont Viso (Italie). À long terme, de nouvelles stratégies seront nécessaires pour faire face à la crise climatique, comme l’installation de toilettes sèches ou le recours à l’énergie solaire.

L’agriculture et la sylviculture doivent également se préparer à une recrudescence des épisodes de sécheresse et des événements météorologiques extrêmes liés au changement climatique : les incendies de forêt se multiplient, comme celui de Kranj (Slovénie) il y a quelques semaines, et les arbres deviennent plus sensibles aux maladies. La saison en alpage se raccourcit, tandis que la sécheresse entraîne des pertes de récolte. L’Observatoire européen de la sécheresse (EOD) a constaté dès le mois d’avril que les sols étaient beaucoup plus secs que d’habitude dans une grande partie des Alpes. Les tempêtes de grêle et les fortes pluies, comme celles qui ont touché la Bavière (Allemagne) et le nord de l’Italie au début de l’été, aggravent encore la situation des agricultrices et des agriculteurs des Alpes.

Dans les Alpes, l’hiver 2021/22 a été nettement moins pluvieux qu’à l’ordinaire. Dans de nombreuses régions, il n’y a eu ni pluie, ni neige pendant plus de 100 jours. Le déficit en eau atteint 60 %, avec des pics de 80 à 90 % dans le Piémont italien. « On peut affirmer avec une certaine certitude que de telles situations se produiront encore plus fréquemment dans les années à venir », déclare Vanda Bonardo, présidente de CIPRA Italie. « Des épisodes de sécheresse persistants, associés à une hausse des températures, entraîneront des changements radicaux dans nos montagnes. »

 

Sources :

www.cipra.org/it/cipra/italia (it), www.alpenverein.de/huetten-wege-touren/huetteninfo/huettentechnik/wasserversorgung-unserer-alpenvereinshuetten_aid_33826.html (de), https://www.sac-cas.ch/fr/les-alpes/quand-lor-bleu-vient-a-manquer-23890/, https://orf.at/stories/3263842/ (de),www.montagna.tv/199044/rifugi-alpini-senzacqua-si-teme-per-lestate/ (it), www.gov.si/assets/organi-v-sestavi/URSZR/Publikacija/Ujma/2020/2021/Susa-leta-2020-v-alpskem-prostoru.pdf (sl), https://edo.jrc.ec.europa.eu/documents/news/GDO-EDODroughtNews202204_Europe.pdf (en), www.daswetter.com/nachrichten/aktuelles/schwere-unwetter-hagel-alpen.html (de), https://n1info.si/novice/slovenija/kaksne-so-posledice-pozara-ki-je-tri-dni-divjal-v-preddvoru/ (sl)