Antoine Pin de Protect Our Winters France, “Pour changer les mobilités, l’imaginaire est le premier pas”

Dans le cadre du projet Erasmus+ DINAMO, mené par CIPRA France et Allemagne pour promouvoir les solutions de mobilité durables dans les territoires ruraux et de montagne, CIPRA France a eu l’occasion d’interviewer 3 de ses membres sur leurs initiatives. Découvrez les interviews mobilité de Juliette Dané (Mountain Wilderness), Louis Didelle (L’Escarpade) et d’Antoine Pin (Protect Our Winters) sur notre site internet.

Peux-tu te présenter et parler de ta structure ?

Antoine Pin, je suis directeur de Protect Our Winters (POW) France. L’association se veut être une porte d’entrée à l’engagement climatique pour toutes les personnes qui se sentent touchées dans leur sport de pleine nature.

POW porte à la fois des actions collectives (manifestations, contestations, votation…) et la question de la mobilité douce, active, partagée et inclusive. Ce lien cristallise tous les sujets de l’association : la mobilité est entre l’engagement individuel et l’engagement collectif. C’est un choix individuel de laisser sa voiture au garage mais c’est un choix collectif de mettre en place des bus en face de chez soi.

C’est à travers 3 axes que nous agissons. Le premier c’est inspirer de nouveaux imaginaires, car c’est le premier pas. Notre bagage culturel et notre créativité nous a, par exemple, entraîné au réflexe de prendre la voiture, POW souhaite combattre ce réflexe culturel. Le deuxième axe, c’est d’outiller, de donner les moyens nécessaires, à l’image de l’outil POW mobility. Le dernier, c’est le plaidoyer : il n’y a pas encore assez de trains et de bus, et ils sont encore trop chers, donc il faut toujours plus de solution afin de permettre l’engagement individuel.

 

Quel est l’objectif de l’outil POW mobility ?

POW mobility est un outil de MAAS, Mobility As A Service, qui permet à celles et ceux qui le souhaitent d’acheter leur titre de transport à destination de 110 stations de ski de Savoie et de Haute-Savoie depuis toute l’Europe. Actuellement, la technologie est fonctionnelle quand il y a des bus et que les billets peuvent être achetés en ligne. L’outil trouve un itinéraire qui les prend en compte et complète avec des taxis ou de la location de voiture le cas échéant. Cela permet de montrer que le prix est doublé voire triplé quand il n’y a pas de solution, c’est un bon plaidoyer, notamment pour démontrer en live sur l’accessibilité ou non d’un lieu. Mais c’est également un bon outil pour réserver ses transports depuis son domicile pour les habitants des stations et du territoire alentour.

La Loi d’Orientation des Mobilités (LOM) de 2019 prône la digitalisation de l’offre avec la volonté d’un billet unique à toutes les échelles mais certains freins restent identifiables. Le premier, c’est le manque d’intégration de cette loi par les municipalités, aussi bien pour des raisons d’omission, que financières et de compétences. Le second, c’est que les outils ne peuvent pas trouver les informations qui ne sont pas digitalisées. Le dernier facteur est humain, très peu d’entre nous sont prêts à faire un trajet avec l’incertitude d’avoir une place dans le dernier tronçon.

 

Quelles seraient les moyens d’enrayer une évolution opérationnelle de la mobilité ?

Voici une liste non exhaustive des points les plus facilement applicables et les plus rapidement opérationnels :

  • Créer un programme inter-régional transalpin, c’est une offre activable assez facilement. En investissant 10 millions, il est déjà possible d’intégrer beaucoup de territoires alpins et ça aiderait tous les outils de planification.

  • Porter une mesure de taxation du kérosène sur les avions à un niveau européen. En effet, le tourisme en montagne est extrêmement tributaire d’une fréquentation en avion, ça aurait du sens pour le milieu de montagne.

  • Remettre en place et développer les trains de nuit. Les élus nationaux n’ont pas nécessairement d’appétence à ce sujet mais ce sont des alliés qu’on peut aller chercher. POW a d’ailleurs travaillé sur la question et publié pas mal de contenu à ce sujet, notamment aux côtés du collectif “oui au train de nuit”.

  • Mener une politique d’encouragement au covoiturage (via blabladaily), en s’inspirant de la Savoie, le seul département complet à porter un programme comme celui-ci. C’est un projet facilement duplicable à l’échelle des départements français et même ailleurs à l’image de l'arc alpin.

  • Travailler sur l’uniformisation des tarifications inter-régionales (sur les TER), un combat actuellement très franco-français puisque c’est une problématique qu’on ne rencontre pas dans d’autres pays européens.

  • Continuer à financer des pistes cyclables, partout, et tout le temps pour accroître la cyclabilité des habitants

  • Baisser la vitesse maxime à 110 km/h sur les autoroutes pour limiter les émissions de carbone.